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"Édouard aux mains d'argent" de Tim Burton

Édouard aux mains d’argent sorti en 1990 est un des films majeurs de Tim Burton, cinéaste américain oh combien créatif dans le fond et la forme, qui a su marier conte fantastique, réalisme urbain et satyre tout au long de son parcours, même si il s’est parfois égaré en exploitant excessivement le filon des vielles légendes anglo-saxonnes comme Sleepy Hollow ou Alice au Pays des Merveilles dont il a rendu une version un peu trop décalée et parodique avec sa débauche de couleurs, de maquillage et d’effets spéciaux criards, ainsi que dans son adaptation du roman Charlie et la Chocolaterie où il était difficile pour le spectateur de saisir la portée pédagogique de cette satyre un peu trop appuyée du consumérisme.

Néanmoins, Tim Burton a réalisé plusieurs grands films assez différents les uns des autres, comme Mars Attaque (1996) auquel j’ai précédemment consacré un article, Ed Wood (1994) biopic étrange mais réussi du « réalisateur le plus mauvais de l’histoire » mais non moins passionné. Ensuite il y eu en 2003 l’épique et poétique Big Fish, à l’esthétique soignée mais épurée, loin des habituelles prouesses visuelles de Tim Burton, avec en plus un casting remarquable incluant son épouse Helena Bonham Carter.

Big Eyes (2014) vaut également le détour pour son intrigue bien ficelée avec son hommage aux arts plastiques et aux années 1960, et où l’on a remarqué la grande prestation de Amy Adams aux côtés de Christoph Waltz.

Pour en revenir à Édouard aux Mains d’Argent, il a acquis pour certains le statut de « film culte », en raison de plusieurs facteurs comme la musique, un choix de costumes judicieux, notamment pour Johnny Depp, acteur fétiche de Tim Burton avec qui il a collaboré huit fois ! Il y a également certaines scènes du film qui ne sont pas faciles à oublier une fois qu’on les a regardées.

Cela dit, au-delà du caractère culte ou pas de ce film, je pense qu’il appartient à la catégorie des grands opus qui vous font entrer dès le début dans leur univers, leur atmosphère singulière, avec notamment ces très beaux décors des banlieues américaines à l’apparence simple. Mais Burton parvient à leur insuffler un aspect quasi magique en y incorporant son amour de la culture américaine des années 60, ce qui donne à son esthétique un côté toujours décalé même s’il n’a pas recours aux effets spéciaux. C’est peut-être cette impression de « réalisme magique » qui prépare le spectateur aux événements de ce conte moderne où les apparences peuvent être trompeuses ou pas, où le merveilleux côtoie le cynisme et les calculs consuméristes.

Pour résumer l’histoire, Édouard est la créature incomplète d’un savant vivant seul dans un grand château isolé, qui parvient à faire ressembler Édouard, en tous points, à un homme mais qui meurt avant de l’avoir doter de mains pour remplacer les grands ciseaux incisifs qui peuvent s’avérer très dangereux, comme on le verra par la suite dans le film. Un jour, une brave représentante en produits divers et mère de famille monte au château et y découvre Édouard. D’abord apeurée, elle décide finalement de prendre avec elle l’individu curieux afin qu’il vive chez elle, avec son mari et ses deux enfants. S’en suit une série de situations rocambolesques et parfois gênantes à cause des fameux ciseaux tranchants qui peuvent causer beaucoup de tord aux objets mais également aux personnes vivant dans le voisinage.

Cependant, il s’avère très vite que grâce à son « anomalie » Édouard peut être très utile et ses ciseaux peuvent servir à beaucoup de choses pour les habitants du quartier, mais le problème est que certaines personnes mal intentionnées tentent d’exploiter son talent pour accomplir leurs méfaits, et il n’est pas toujours facile pour l’étrange Édouard, qui n'a jamais vécu en société, de distinguer le bien du mal, ni de comprendre ce qu’on a le droit de faire ou pas afin de faire plaisir aux gens qu’on aime, d’autant plus qu’il s’éprend de la grande fille de sa famille d’accueil campée par une Winona Ryder remarquable et époustouflante de justesse malgré ses dix-neuf ans à l’époque.

Mais au-delà des idées et des questions posées par le film, sa magie réside dans sa mise en scène poétique que chacun peut apprécier et interpréter selon son propre vécu et sa sensibilité, comme c’est le cas des films d’un autre grand réalisateur américain d’un style différent, Gus Van Sant (Will Hunting, Drugstore Cowboy).  

Par ailleurs, L’humeur n’enlève rien à l’esthétique d’Édouard aux mains d’argent, ni ses passages violents liés aux inévitables accidents que peuvent provoquer les ciseaux d’Édouard malgré toute sa bonne volonté.

Bien-sûr ce film est un conte, et il ne peut résumer tous les problèmes vécus par les gens ayant un handicap et par leur entourage. Néanmoins, on n’en ressort avec l’envie d’être plus humain, de comprendre son prochain et d’éviter les conclusions hâtives et les malentendus en tous genres. Et pour toutes ces raisons nous disons merci à Tim Burton et à tous les cinéastes qui l’ont inspiré.

 

Lyès  Ferhani 

Tag(s) : #Cinéma
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