Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Indépendance : Roman de Richard Ford

Richard Ford, auteur "culte" selon son éditeur français l’Olivier. Ce terme a-t-il encore un sens, surtout lorsqu'il s'applique à un écrivain qui a forcément besoin de lecteurs pour exister, même dans l’ombre. On pourrait dire d’un musicien de jazz ou d’un groupe de rock underground sauvés par internet qu’ils sont culte, mais en est-il de la même lorsqu'on parle de littérature....

Cela étant dit, Indépendance (1996) est un roman important à plus d’un titre.

Il nous plonge d’emblée dans la réalité urbaine américaine des années 1980, avec un style précis digne d’un Steinbeck, et une ironie proche de Salinger, avant de nous faire vivre le quotidien d’un certain Frank Bascombe (personnage récurrent dans plusieurs livres de Ford). Ce Frank Bascombe donc est un agent immobilier, divorcé, qui tente de mener à bien plusieurs missions.  D'abord vendre une maison à un couple de retraités récalcitrants, puis garder le contact avec une nouvelle petite amie bohème, et enfin emmener son fils de 14 ans en week-end sur certaines des grandes routes américaines,  afin de lui « transmettre quelque chose ». Cette dernière mission lui imposera de rencontrer à nouveau son ex-femme, ainsi que l’homme qu’elle a épousé, et qui ne plaît pas du tout à Frank Bascombe...

On a dit de Richard Ford qu’il n'a jamais caché dans ses livres une certaine hostilité, même ironique, envers les conservateurs américains. Pourtant, dans ce livre, le personnage principal a certes des convictions de gauche, mais il ne parvient pas à les mettre en pratique.

Il croît pouvoir vendre une maison au couple des Markham en jouant sur ses talents de vendeur, mais également sur ce qui relève pour lui du pragmatisme pouvant servir l'intérêt public.  Or, l’homme du couple s’avère intraitable et « vissé sur son fauteuil comme un astronaute près à être envoyé sur la lune ».

Frank Bascombe n’arrive pas non plus à convaincre son ex-femme qu’elle doit lui laisser une seconde chance ; le passage de l’appel téléphonique dans une aire d'autoroute est particulièrement drôle.   

Enfin, notre héros progressiste, farouchement opposé à Reagan et Bush père, se retrouve incapable de communiquer avec son fils lors d’une virée en voiture sur les routes américaines.

Indépendance traite également des questions raciales, parfois avec humour et parfois sur un ton beaucoup plus sérieux voir dramatique.

En ce qui concerne la forme, le style de Richard Ford ne se veut pas forcément moderne, mais il cherche à montrer l’influence de la vie moderne sur les rapports humains. Ainsi, la langue de l’écrivain témoigne des transformations survenues à une époque donnée et de leurs répercussions sur la vie quotidienne de chacun, dans une approche similaire à ce qu'avaient entrepris, au début du vingtième siècle, Louis-Ferdinand Céline ou F. Scott Fitzgerald dans des styles différents, mais qui participent de la même approche littéraire, à savoir le réalisme urbain.

En résumé, Independence est un grand livre, témoignage humble mais lucide sur les États-Unis, ainsi qu’une réflexion sur la capacité de mettre en pratique les principes auxquels on croit.

Ce livre a obtenu le prix Pulitzer de la fiction  et le PEN/Faulkner Award en 1996.

 

Lyes Ferhani

 

Tag(s) : #Littérature
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :