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 l'Islam de l'amour, non de la pitié

La pitié est un sentiment qui ne doit pas être exclu de la société, notamment pour venir en aide aux plus démunis, aux gens en situation précaire, victimes des aléas de la vie, des maladies, ect…

Cela dit, il ne faut pas que la pitié devienne le moteur de la société et son mode de fonctionnement permanent, comme c’est souvent le cas chez nous, car ce sentiment peut vite engendrer des effets pervers contraires au but qu’il s’était fixé, avec en prime la marginalisation des individus les plus qualifiés qui ont moins besoin de compassion que d’être reconnus pour leurs compétences et aptitudes.

Pour commencer, il faut rappeler que pour beaucoup l’Islam est « la religion de la pitié » (Dine Errahma) tandis que le Christianisme serait la religion de l’amour. Rien n’est moins évident. D’abord la religion chrétienne s’est beaucoup appuyée sur le principe de pitié afin d’assoir le pouvoir de l’Église. Certes, les évangiles évoquent assez fréquemment l’amour mais au fil du temps les dignitaires du Christianisme vont recourir à la notion de pitié afin d’assoir leur pouvoir, l’amour étant un sentiment un peu trop égalitaire. Par ailleurs, dans l’art et la littérature des voix se feront entendre afin de remettre en cause l’usage de la pitié ou de la charité chrétienne à des fins inavouées. Le plus récent exemple est l’écrivain français du vingtième siècle Georges Bernanos qui a voulu interroger le sens réel du Christianisme à travers le regard et la vie de certains hommes d’église aux motivations diverses, pas toujours inspirées par de grands sentiments.

Aux États-Unis on peut citer le mouvement transcendentaliste au 19e  siècle, avec notamment Henry David Thoreau qui va s’en prendre au philanthropisme chrétien et à sa propension à régir la vie des gens, en les dépossédant des moyens de leur émancipation effective.

Pour revenir au monde musulman, la pitié condescendante n’a pas été le seul trait caractéristique de l’Islam. La spiritualité soufie, par exemple, a plus eu recours à la notion d’amour, plus égalitaire et moins hypocrite, qui permet d’établir des rapports plus sains entre les individus dans la société, notamment pour ce qui est du rapport de l’être humain au destin, cette notion de destin qui, rappelons-le, est à géométrie variable pour de nombreux commentateurs musulmans qui l’ont utilisée de diverses manières au long de l’histoire, souvent pour justifier le soutien aux khalifes et sultans de l’époque, ou alors afin d’inciter les gens à accepter leur sort sans se révolter. Il faut dire que malheureusement maintenant dans les sociétés musulmanes, y compris en Algérie, c’est le peuple qui s’est imprégné de cette conception du destin accompagnée du recours systématique à la compassion pour venir en aide à des personnes qui ont peut-être moins besoin de charité (sous toutes ses formes) que d’être reconnues pour leurs aptitudes et leurs talents qu’ils pourraient très bien mettre au service de la société afin de la faire évoluer.

Il est quand-même aberrant qu’une personne avec de moindres qualifications intellectuelles se sente le besoin d’avoir de la compassion pour quelqu’un de plus intelligent, alors qu’elle pourrait éprouver de l’amour oui,  au sens égalitaire, comme l’a préconisé en son temps le théologien et philosophe soufi Ibn Arabi.

Lyes  Ferhani

 

Tag(s) : #Société
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